dimanche 15 novembre 2009

Extraction identitaire

Chers voyageurs expatriés, rapatriés ou simplement mal triés, à l'heure où la notion d'identité nationale délie les langues sans pour autant en améliorer la qualité orthographique ou grammaticale, il me semble opportun d'évoquer ici certaines motivations qui ont guidé mes choix géographiques lors de cette dernière décennie.

Oui, Mesdames et Messieurs les Jurés, je l'avoue : j'ai choisi, il y a quelques années, de vivre en ces lieux, captivé par les charmes légendaires de la Bretagne, de même que par ceux - non moins discrets - d'une Alsacienne exilée.
Oui, je me souviens avoir bravé avec un sourire non feint les effluves écœurants des galettes-saucisses lors des trop nombreuses soirées de rencontres footballistiques.
Oui, je reconnais avoir affiché ce même sourire à la lecture des réguliers faits divers mentionnant les promenades automobiles de personnes âgées à contre-sens sur les autoroutes bretonnes.
Oui, j'admets m'être aussi délecté d'espèces piscicoles en voie d'extinction.
Mais sachez, Mesdames et Messieurs les Jurés, que je conserverai définitivement en mémoire cette délicieuse excitation liée aux ambiances festives des petits bars rennais du centre-ville, ceux-là même qui parsemaient ou jouxtaient la rue de la Soif que l'on croyait aussi immortelle que pittoresque, lors de cette belle époque où les fumeurs - constituant alors l'écrasante néanmoins cohérente majorité de leur clientèle - étaient les bienvenus.

Oui, j'ai adoré fusionner avec cette culture identitaire.

Aujourd'hui, la chaîne télévisuelle anémique française numérotée 6 a diffusé son émission phare "Un dîner presque parfait" récemment tournée en environnement rennais, présentant judicieusement des spécialités culinaires polonaises, allemandes, et sénégalaises.

Aujourd'hui, la ville de Rennes rachète les bars de cette fameuse rue de la Soif pour en limiter les opportunités de festivité nocturne.
Ouest-France

Aujourd'hui, à l'heure où l'on envisage de jouer du biniou au sommet des minarets jaillissants et boire aimablement du thé aux heures convenables dans les ruelles autrefois folkloriques, je fais appel aux Déménageurs bretons... avant qu'ils ne changent de couvre-chef, eux aussi.

2 commentaires:

  1. Déménageurs bretons...

    Même sans eux, j'ai réussi à m'installer (provisoirement) à quelques kilomètres de Genève. Je pense pouvoir me débrouiller toute seule pour arriver de l'autre côté de la frontière.

    "Selbst ist der Mann!"

    Ton article est excellent, mais comme je ne suis pas Française, je ne sais pas si j'ai le droit de m'exprimer.
    De nos jours, il faut être prudent(e)...

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  2. @ CM

    Ravi de vous savoir aussi proche de la frontière à ce jour, ma chère.
    De mon côté, une certaine sclérose m'interdisant d'effectuer le grand écart aussi brutalement, j'envisage pour l'instant d'investir la région champenoise, bien qu'ayant une sainte horreur des cathédrales et de tout alcool pétillant.

    Et vous n'êtes aucunement muselée en ces lieux, bien au contraire.

    @ [...]aen(nne)

    Please respect the winter break and don't make my headache worse.

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